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Les Cattleyas







Dans mon jardin d’hiver
les cattleyas blanche-neige
et un cœur bleu d’acier


 - Elisabeth Serafimovski

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Photo: Jess Rola

Allez au Cirque


Je suis un homme de cirque; c'est moi qui a trouvé la femme à trois têtes pour Barnum, et trouvé le seul éléphant qui peut jouer 'Sur le Pont d'Avignon' au piano.
- Lola Montes


LES CHATS

Les amoureux fervents et les savants austères
Aiment également, dans leur mûre saison,
Les chats puissants et doux, orgueil de la maison,
Qui comme eux sont frileux et comme eux sédentaires.
Amis de la science et de la volupté
Ils cherchent le silence et l'horreur des ténèbres;
L'Erèbe les eût pris pour ses coursiers funèbres,
S'ils pouvaient au servage incliner leur fierté.
Ils prennent en songeant les nobles attitudes
Des grands sphinx allongés au fond des solitudes,
Qui semblent s'endormir dans un rêve sans fin;
Leurs reins féconds sont pleins d'étincelles magiques,
Et des parcelles d'or, ainsi qu'un sable fin,
Etoilent vaguement leurs prunelles mystiques.
— Charles Baudelaire

Bienvenue au Cabaret




En la forêt d'Ennuyeuse Tristesse
 
En la forêt d'Ennuyeuse Tristesse,
Un jour m'advint qu'à par moi cheminoye,
Et rencontrai l'Amoureuse Déesse
Qui m'appela, demandant où j'alloye.
Je répondis que, par Fortune, estoye
Is en exil en ce bois, long temps a,
Et qu'à bon droit appeler me pouvoye
L'homme égaré qui ne sait où il va.

En souriant, par sa trés grande humblesse,
E répondit : " Ami, si je savoye
Pourquoi tu es mis en cette détresse,
A mon pouvoir volontiers t'aideroye ;
Car, jà piéça, je mis ton coeur en voye
De tout plaisir, ne sais qui l'en ôta ;
Or me déplaît qu'à présent je te voye
L'homme égaré qui ne sait où il va.

Hélas ! dis-je, souveraine Princesse,
On fait savez, pourquoi le vous diroye ?
C'est par la Mort qui fait à tous rudesse,
Qui m'a tollu celle que tant amoye,
En qui était tout l'espoir que j'avoye,
Qui me guidait, si bien m'accompagna
En son vivant, que point ne me trouvoye
L'homme égaré qui ne sait où il va.

" Aveugle suis, ne sais où aller doye ;
De mon bâton, afin que ne fourvoye,
Je vais tâtant mon chemin çà et là ;
C'est grand pitié qu'il convient que je soye
L'homme égaré qui ne sait où il va ! "

Au Theatre Des Sons Imaginaires


Thomyris, Queen of the Amazons came on dressed in a very equivocal manner; for, in order to give her a martial look, she had her petticoats trussed up in front above her knees, which were very discernible through her black breeches. However strange this appeared to me, the audience clapped violently, as they did constantly at the worst and most absurd things in the piece. There was a great deal of religion in it, and such anachronisms, that they talked of J. C. and the Trinity, nor were Free-will and Predestination forgotten; and when Cyrus is dying of the wound he received in battle, he is examined by a Jewish priest, a principal character in the play, as his confessor, concerning his religious principles, and he makes to him a profession of faith.
-CHARLES BURNEY, THE PRESENT STATE OF MUSIC IN FRANCE AND ITALY

Nichts vom Triumph mir! Nichts vom Rosenfeste!
Es ruft die Schlacht noch einmal mich ins Feld. 
Den jungen trotz'gen Kriegsgott bänd'g' ich mir, 
Gefährtinnen, zehntausend Sonnen dünken, 
Zu einem Glutball eingeschmelzt, so glanzvoll 
Nicht, als ein Sieg, ein Sieg mir über ihn.
- HEINRICH VON KLEIST, PENTHISILEA

With all zeal mighty Bellerophontes seized the winged steed [Pegasos], setting between his jaws the soothing charm, and mounting him, in his bronze panoply played him in sport, to try his pace. And once [in Lykia], with him, he smote the Amazones, from the chill bosom of the lonely air, that archered host of women-kind.
- PINDAR, OLYPIAN ODE 13 

Monstre Sacré


« Il faut haïr très peu, car c'est très fatigant. Il faut mépriser beaucoup, pardonner souvent, mais ne jamais oublier. »
- SARAH BERNHARDT (Portrait par Nadar)

Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue ;
Un trouble s'éleva dans mon âme éperdue ;
Mes yeux ne voyaient plus, je ne pouvais parler ;
Je sentis tout mon corps et transir et brûler.
Je reconnus Vénus et ses feux redoutables,
D'un sang qu'elle poursuit tourments inévitables.
Par des voeux assidus je crus les détourner :
Je lui bâtis un temple, et pris soin de l'orner ;
De victimes moi-même à toute heure entourée,
Je cherchais dans leurs flancs ma raison égarée,
D'un incurable amour remèdes impuissants !
En vain sur les autels ma main brûlait l'encens :
Quand ma bouche implorait le nom de la Déesse,
J'adorais Hippolyte ; et le voyant sans cesse,
Même au pied des autels que je faisais fumer,
J'offrais tout à ce Dieu que je n'osais nommer.
Je l'évitais partout. O comble de misère !
Mes yeux le retrouvaient dans les traits de son père.
- JEAN RACINE, PHÈDRE

En voyant l'aveuglement et la misère de l'homme, en regardant tout l'univers muet et l'homme sans lumière abandonné à lui-même, et comme égaré dans ce recoin de l'univers sans savoir qui l'y a mis, ce qu'il y est venu faire, ce qu'il deviendra en mourant, incapable de toute connaissance, j'entre en effroi comme un homme qu'on aurait porté endormi dans une île déserte et effroyable, et qui s'éveillerait sans connaître et sans moyen d'en sortir. Et sur cela j'admire comment on n'entre point en désespoir d'un si misérable état. Je vois d'autres personnes auprès de moi d'une semblable nature. Je leur demande s'ils sont mieux instruits que moi. Ils me disent que non et sur cela ces misérables égarés, ayant regardé autour d'eux et ayant vu quelques objets plaisants s'y sont donnés et s'y sont attachés. Pour moi je n'ai pu y prendre d'attache et considérant combien il y a plus d'apparence qu'il y a autre chose que ce que je vois j'ai recherché si ce Dieu n'aurait point laissé quelque marque de soi.
- BLAISE PASCAL, PENSÉES

Fin de la Mort



Sous une lumière blafarde
Court, danse et se tord sans raison
La Vie, impudente et criarde.
Aussi, sitôt qu'à l'horizon

La nuit voluptueuse monte,
Apaisant tout, même la faim,
Effaçant tout, même la honte,
Le Poète se dit: "Enfin!
Mon esprit, comme mes vertèbres,
Invoque ardemment le repos;
Le coeur plein de songes funèbres,
Je vais me coucher sur le dos
Et me rouler dans vos rideaux,
O rafraîchissantes ténèbres!"
 - CHARLES BAUDELAIRE, LA MORT